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Les maisons de tolérance à Castelsarrasin 1848-1946

LES MAISONS DE TOLÉRANCE À CASTELSARRASIN  – 1848 / 1946 –

     Conférence du mois d’avril  par Bernard OUARDES : 
     La prostitution un sujet tabou ? Bernard Ouardes, après un large panorama sur l’histoire de la prostitution s’est attaché à dévoiler ce qu’il en était pour Castelsarrasin à partir de l’étude de documents d’archives, de témoignages et de photographies.

    Dans l’Antiquité le marché du sexe était légalement ouvert à tous. En Grèce, existaient les ‘’Temples de l’amour’’ Chez les Romains, même si le commerce de la chair n’est pas circonscrit à des lieux particuliers, les ‘’lupanars’’, sont considérés comme les ancêtres des bordels. À Pompéi, les nombreux graffiti et peintures témoignent de la relative liberté des mœurs d’alors.

     Cette liberté on la retrouve au Moyen Age où la prostitution est considérée comme un moindre mal. Les bains publics se multiplient et dans ces lieux de plaisirs mixtes la prostitution est tolérée. Mais peu à peu ils seront circonscrits à des zones spécifiques. Au 13ème siècle à Paris, les prostituées sont installées en bord de Seine dans des baraques appelées –bordes– on parle alors de –bordelières

     À partir du 16ème siècle, l’influence de la religion et l’apparition de la syphilis qui décime la population, expliquent la volonté de lutter contre la prostitution. C’est la création de la police des mœurs au 17ème siècle et Louis XIV ordonnera l’emprisonnement ou la déportation des femmes soupçonnées de prostitution. Plus tard, au siècle des Lumières  va apparaître la -maison close- moderne, d’un luxe inégalé. La Révolution, elle aussi, reste clairement contre la dépravation des mœurs, même si dans certains quartiers les filles ‘’tiennent boutique’’.

     Au tournant du 19ème siècle on estime que Paris comptait 30 000 prostituées dites modestes et 10 000 dites de luxe. Face à cet échec de l’ordre moral il est mis en place un système dit de –tolérance-, système garant de l’ordre sécuritaire lié à l’ordre moral et surtout garant de l’ordre sanitaire, alors que l’hygiène devient une préoccupation essentielle de la bonne société. Bernard Ouardes s’est penché sur la vie des pensionnaires de ces maisons devenues … de rendez-vous, qui se résume à une existence de recluses entre maison et dispensaire. Elles doivent payer leur nourriture, les frais de lingerie, de toilette et partager le prix de la passe avec la tenancière. À la tête des maisons closes se trouve ‘’Monsieur’’ (le proxénète de l’époque), mais c’est une ‘’Madame’’ qui gère l’établissement et les pensionnaires. Elle gère leur travail, les visites sanitaires et a connaissance des rapports de police indiquant leur ‘’bon’’ ou ‘’mauvais état’’ ! En plus du –Guide Rose– annuaire des maisons les plus huppées, (qui ont inspiré des artistes comme Toulouse d’Autrec, Manet) aux bouges et maisons d’abattage, qui comptent jusqu’à 50 pensionnaires, le conférencier évoque aussi le sort des insoumises, appelées ‘’les pierreuses’’, les ‘’frôleuses’’ qui se disputent les clients dans la rue et qui ont inspiré des chansons comme ’’La rue de la Joie’’ chantée par Damia.

     Bernard Ouardes en vient à l’apparition des maisons de tolérance à Castelsarrasin, dont il trouve la première trace en date d’octobre 1849 aux archives municipales, à travers une plainte des habitants du faubourg des Capucins contre les filles publiques. Certaines de ces pensionnaires vont devenir elles-mêmes tenancières de ces maisons de tolérance, comme Marie Hilaire ou Félicie Franceries.  On peut dire que cette dernière a fait carrière comme tenancière puisqu’elle ouvrira successivement plusieurs maisons dont la dernière rue des Cheneviers.  Peut-on y voir la conséquence de la construction de la caserne Banel et de l’ouverture de l’usine Sainte Marguerite ? Un arrêté municipal de l’époque nous renseigne sur les contrôles dont sont l’objet les filles :  inscription obligatoire au bureau de police, contrôle sanitaire hebdomadaire payant, transport à l’hospice de Montauban en cas d’infection… Seules les tenancières pouvaient circuler ‘’décemment vêtues’’. L’entrée de la maison devait être éclairée par une lanterne rouge et les fenêtres garnies de barreaux !